33. Roshan Sagar à ton tour

Toute dotée d'un diplôme en médecine qui ne lui sert pas à exercer qu'elle soit, Atiya a réveillé toute la maison quand les contractions ont commencé. A l'exception notoire, certes, du papa administratif, qui dormait du sommeil de l'innocent sous le portrait de sa femme et du vrai père.

" - Aaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaah !
  - T'inquiète Atiya, tu crois que tu vas être écartelée de l'intérieur, moi j'avais cette phobie là, mais en fait, après, c'est un immense bonheur qui te submerge et tout ça à côté...
  - Aaaaaaaaaaargh ! Juliiiiiiiiiiiiiiiiiiien, réveille toi b**** !"

Julien doit être sourd. Ou alors ses tympans ont été détruits avant qu'il ait eu le temps de se réveiller. Bref... c'est moi qui ai dû emmener Atiya à la maternité. Celle-là même où elle ne travaille pas, dans l'hôpital où elle n'a jamais pu entrer... de quoi améliorer l'ambiance.

A notre retour, tout le monde s'est réuni pour la féliciter, et elle exultait de fierté comme une ado qui secoue son bulletin de notes.

" - Comment il s'appelle, ce beau bébé ?
  - Roshan Sagar !
  - Ah, un prénom composé... c'est.... euh... bourgeois...
  - C'est indien, comme Atiya, comme Maman l'avait choisi pour notre branche ! Ca veut dire l'Océan, pour qu'il soit fort et puissant"

Y'en a une qu'a pas oublié de chercher à poursuivre sa lignée. Je ne lui jette pas la pierre, j'étais dans le même état d'esprit à la naissance de Ryszard. D'ailleurs elle a tout copié pour le prénom. M'enfin, moi, j'avais l'excuse d'être jeune.

"Bon ben Julien, t'as bien dormi pendant que je donnais naissance à ton fils ? J'espère que tu t'es bien reposé, égoïste, parce que dans cet hôpital minable que je réorganiserais bien de A à Z, j'ai pas réussi à fermer l'œil. Occupe-t'en !"

Atiya, qui n'a jamais eu le sommeil léger, était déjà dans les bras de Morphée que Julien savait toujours pas quoi faire du bébé qui était dans ses bras à lui. Karima aurait bien aidé, mais elle était quand même vexée par la remarque d'Atiya sur l'hôpital, où elle était si fière de son système de numéros qu'on appelle comme à la Poste.

Comme le Julien semblait pas prêt à trouver quoi faire, j'ai fini par m'en occuper, de ce pauvre nouveau-né. Je ne doute pas une seule seconde qu'Atiya soit en train de rêver qu'il sera l'héritier d'Erehwon, avec peut-être même des prétentions sur la fortune du Bigster. Et sans doute qu'il sera chef de staff, tant qu'à faire. Il faudra que je lui explique où ça m'a menée avec Ryszard, à trop vouloir le modeler à mon image. En même temps, ça risque d'être difficile de lui faire comprendre que je ne suis pas franchement ravie qu'il veuille lui emboîter le pas en toute chose.

Il est bien mignon, ce bébé. Encore tout innocent, on devinerait pas qu'il est d'Atiya.

Ryszard est émerveillé par son petit cousin. J'étais tellement épuisée de pas avoir fait ma nuit que je le lui ai confié. J'aurais pas dû...

Ryszard, il est très gentil, mais il peut parfois être étourdi...

Depuis ce malencontreux épisode, Atiya vient le changer chaque nuit dans notre chambre, à grand renfort de bruit qui réveille...

Quant au cocu, s'il est émerveillé devant "son" fils, Atiya ne veut plus qu'il l'approche depuis qu'il reparle de son copain-lapin aux oreilles grandes comme ses cornes. Ca va pas aider à le faire partir...

John Bigster est venu voir son fils, sans guillemets. Comme Julien lui a parlé de son lapin jaune, ça a bien fait rigoler John, qui l'a pris pour un dingo.

"- Regardez, là, dans votre dos, il est là, il me poursuit !
  - Et moi, dans votre dos, j'embrasse votre femme !"

" - Mais lààààà, regardez, le lapin jaune maléfique rigole sardoniquement !!!
  - Et sinon, quand vous serez parti, on fera crac-crac dans le jacuzzi !"

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