23. Tous des super-héros sauf bibi
Sophie est rentrée surexaltée à Erehwon. Encore plus que d'habitude, j'entends, parce que ma douce adore faire savoir qu'elle est de retour à la maison.
Les enfants du centre aéré adorent le spectacle de Noël qu'elle leur a fait monter, une reprise de la comédie musicale à la mode. Jusque là, pas de quoi déclencher une hola pour soi-même sur le parvis. Mais ladite comédie, c'est celle où joue Karim, qui se promène actuellement du côté du genre de Broadway, un style qui lui sied pour n'avoir pas trop à craindre d'en faire trop.
Touché droit au coeur, de son ego notamment, il a tenu à remercier Sophie. Et de fil en aiguille et de piston en connivences, on lui a proposé de devenir juge de la Pop Académie. Les producteurs étaient ravis de pouvoir lancer les bandes annonces de la 124° saison sur "l'arrivée de la belle-fille de Pépé le Largué : saura-t-elle sauver les goûts de sa famille de la ringardise ?" pour relancer l'audience de leur télé-crochet.
Loin de se planter, Sophie y est allée avec la candeur qui fait tout son charme, et elle a recueilli tous les suffrages en distribuant les siens. Même si je dois dire qu'en matière musicale je trouve parfois qu'elle s'enthousiasme pour de la soupe, c'est apparemment la même que celle qu'aiment avaler les spectateurs de l'émission. Léanne, coeur de cible du public visé, est incouchable les soirs d'émission tant que sa mère n'est pas rentrée des studios.
"T'étais trop géniale, M'man ! Les Rhinos féroces ils sont supers, t'as trop bien fait de voter pour eux ! Tu m'as ramené un poster dédicacé dis, dis, dis ???"
Mais la gloire de Sophie, ce n'est rien à côté du prestige de Tata Jess l'Ultra-Sim qui a ultra-sauvé le monde.
Parce que si chez nous tout le monde excelle dans son travail (sauf moi, mais je vais y revenir et m'y apesantir), l'économie générale du pays, elle, ne va toujours pas mieux. Une espèce de faction armée dissidente de désespérés a voulu faire une sorte de révolution, ils ont pris en otage des membres du gouvernement en visite dans le district de New Frontier pour voir l'avancée de la colonie et, en même temps, ont pris d'assaut une centrale nucléaire qu'ils menaçaient de faire péter avec eux, tout le reste du district et même toute la planète tant qu'ils étaient à vouloir marquer le coup.
Jess a réussi à neutraliser les preneurs d'otage pendant qu'une équipe d'intervention spéciale désactivait la centrale nucléaire, tout ça en direct sur Sims Info TV. Depuis, c'est une vraie héroïne, couverte de médailles et de primes de risque ; elle va même être déclinée en bande dessinée.
Depuis aussi, Léanne lui voue un culte, tout ce que dit Jessica est devenu parole d'évangile. Elle arrive même à faire hurler la petite de joie en lui proposant de faire ses devoirs.
Si j'étais un peu déçu de voir ma fille s'éloigner à grands pas des miens, il est difficile de se plaindre. Les envies de "faire tout comme tata Jessica", c'est une phase qui durera tant qu'elle ne s'ennuiera pas, ce qui ne saurait trop tarder à mon avis, mais dans l'intervalle, le calme règne à la maison.
Mon pacha de frère, pendant ce temps là, bénéficie sans effort des retombées de la gloire de sa femme. La fameuse comédie musicale dans laquelle il joue, c'est une reconstitution des hauts faits d'Ultra-Jess, avec budget démentiel, effets spéciaux et exagérations holly-bolly-woodiennes de ce qui s'est passé, où il joue son propre rôle. Moi, je rigolerais bien si j'avais le coeur à ça : son implication s'est limitée à être collé devant Sims Info TV avec moi à se ronger les ongles jusqu'à s'en manger les doigts.
Mais par la magie de la réécriture de l'histoire, Tonton Karim est devenu la star par laquelle il vaut la peine de se faire féliciter quand on ramène un 20/20, plutôt que par son vieux schnock de père...
Parce que moi... moi, à vrai dire, je ne comprends pas ce qui m'est arrivé. Vraiment pas. Et je n'ai pas envie de me retourner pour montrer ce qui m'est tombé dessus pour l'instant, tant que je ne suis pas complètement certain que ce ne soit pas effaçable.
Je manque d'explication... Je suis celui qui a toujours pris le plus soin à se maintenir au top de sa forme, des fois que les Llamas recrutent, ce dont je n'ai jamais perdu espoir jusqu'à maintenant... Même Jessica n'a jamais été aussi assidue à l'entraînement, en tout cas à la maison où elle s'obstine de toute façon à dissimuler ses ultra-pouvoirs comme un agent de la CIA. Alors POURQUOI suis-je le premier ici à avoir pris un coup de vieux qui s'affiche nettement sur ma tronche ??? On ne va quand même pas me faire croire que le sport nuit à la santé !!!
Je comprends d'autant moins que Karim, qui est quand même mon frère jumeau, on ne peut pas faire plus pareil en âge à quelques minutes près, et je rappelle que c'est lui l'aîné, ne prend pas une ride. Ca l'amuse même beaucoup, que j'ai les cheveux qui grisonnent, le dos qui se voûte et le ventre qui bedonne...
"Ben alors, frangin, c'est quoi cette tête de vieux précoce ? Tu sais quoi, pour une fois, je t'envie pas d'être le premier ! Quand la journaliste sera là pour mon interview, va pas lui dire que t'es mon jumeau, sinon les tabloïds vont s'empresser de sortir que je mens sur mon âge, ça serait un comble à quarante piges !"
Je suis sûr qu'il se teint les cheveux et qu'il utilise le bidule géant expérimental dont se servent, paraît-il, tous les acteurs, et qui lui a coûté une fortune. Il paraît qu'on peut se faire des injections de botox automatiques avec ce machin-là. J'ai surpris Jess en train de trifouiller dessus, soi-disant par curiosité intellectuelle, je suis certain qu'elle programmait ça pour Karim.
Ce vieillissement accéléré arrive d'autant plus mal à propos, comme si ça ne suffisait pas qu'il arrive tout court, que je vais être papa pour la troisième fois.
Oups ! Mauvaise photo... ça, c'est Karim qui a chopé une vraie gastro carabinée en mangeant des petits fours avariés dans sa loge. Bien fait, j'espère que ça fera ressortir son coup de vieux.
Sophie, disais-je, est à nouveau enceinte. Cette fois, c'est moi qui ai dû la convaincre. J'aimerais vraiment avoir un petit gars, lui apprendre à jouer au foot, qu'il reprenne l'engagement à Erehwon comme j'ai pris la succession de mon père... Ca me mettrait bien du baume au coeur, et, puisque les années semblent vouloir marquer leur passage sur moi avec lourdeur pesante et insistante, je pourrais compter sur un bâton de vieillesse. Un garçon, c'est quand même moins lunatique et versatile que les filles.
La preuve :
" - Dis M'man, pourquoi toi tu juges à la Pop Académie et tous mes copains m'envient, Jessica elle sauve le monde et Karim il rejoue tous les soirs l'attaque de l'hôtel de ville où elle a triomphé et P'pa, lui, c'est le seul qu'est pas célèbre et qui passe pas à la télé dans la famille ?
- Ne dis pas ça ma chérie, ton père aurait pu devenir une légende du stade, si l'équipe des Llamas n'avait pas bêtement été au complet pendant 25 ans. Et puis, il est devenu un journaliste très accompli et reconnu par ses pairs, il a même remporté le prix d'excellence....
- Ouais, ouais... J'vais prendre ma douche, M'man"
Je déteste les phrases au conditionnel passé, surtout quand c'est ma femme qui parle de moi. En particulier quand c'est pour expliquer à ma fille que je mérite bien un peu de pitié puisque j'aurais très bien pu être son idole aussi...
... et ça m'affecte d'autant plus quand je surprends cette conversation alors qu'il faut que j'annonce à Sophie qu'il faut désormais passer au passé pour raconter à mes filles que j'étais un journaliste accompli...
Rapat-Sité possède tout, Rapat-Sité contrôle tout, même moi... Edith Taurial, son insupportable nièce, se pique d'avoir une plume, et à force de la renvoyer retravailler ses papiers, c'est moi qui me suis fait rétrograder en bas de l'échelle sans même un coussin par terre pour amortir ma chute, pendant qu'elle était nommée rédac' chef à ma place. Officiellement, bien sûr, c'est "seulement" parce qu'ils veulent donner au journal une image plus jeune et dynamique que... la mienne, prétexte qui ne m'arrange pas vraiment le moral.
"Je sais qu'en ce moment l'avenir semble un peu grisonnant comme mes cheveux, mais je t'assure que c'est juste passager, je vais remonter les échelons, ne t'en fais pas Sophie"
"Oui, tu as raison... c'est un peu comme là, j'ai l'air d'un bibendum, mais après l'accouchement, si j'arrive à perdre les kilos plus facilement qu'après Leokadia, je pourrai remettre ma petite robe rose !"
"Hein, Jess, tu dis rien, mais comme on dit, après la pluie, le beau temps ?"
"Je voudrais pas rompre l'enthousiasme général de cette débauche de poncifs, mais faut être réaliste, Elim, le temps qu'il fait dehors est peut-être cyclique, mais celui qu'on se prend dans les dents il est tout linéaire, et il va rarement dans le sens qu'on voudrait"
Je remercie Jessica et ses leçons de réalisme, grâce à elles Sophie lit "Comment rester cool quand vos enfants vous trouvent vieux" qu'elle a retrouvé dans les affaires de mes parents.
Heureusement, la naissance de Salomeja a mis fin aux lectures prénatales angoissantes.
On a eu une mauvaise surprise, en revanche, en découvrant Karelle en guise de comité d'accueil au retour de la maternité.
"'B'jour Mame Pilgrim ! Encore une fille alors ? C'est votre enfoiré de mari le pourfenleur de nounous ou j'sais pus comment qu'on dit qui doit pas être content de pas avoir eu son garçon. Bien fait pour lui ! Le prenez pas mal, mais vous attendez pas à ce qu'j'vous aide pour celle-ci comme pour les grandes, hein, moi j'ai décidé de pas en glander une pour lui faire voir c'qui lui en coûte, à ce délaveur... délationneur... j'sais pus comment qu'on dit non pus, de cracher sur les nounous dans le canard comme quoi qu'on en fiche pas une rame. Y va voir la différence de comment qu'c'est quand j'fais rien !"
Je ne suis pas certain de voir une quelconque différence, mais je ne comprends pas ce qu'elle fait chez nous : on a pourtant dit et redit à l'agence de nounous qu'on se passerait de leurs services et on leur a envoyé 3 recommandés avec accusé de réception. Mais non, Karelle continue de venir nous traîner dans les pattes, et le pire, c'est qu'elle s'est débrouillée je ne sais pas comment pour maintenir son autorisation de prélèvement sur notre compte pour se payer grassement à jouer à la console vidéo des filles.
Et si on n'a plus besoin de nounou, c'est parce que quitte à avoir l'air d'appartenir au troisième âge et ne plus pouvoir véhiculer une image jeune de la gazette, j'ai décidé de les prendre au mot, et ma retraite anticipée avec. J'en avais assez de ne pas voir le temps filer... c'est simple, les 9 mois de grossesse de Sophie à attendre Salomeja, ils m'ont semblé passer en 3 jours. Désormais, je ne raterai plus une seule minute avec mes filles. Et d'avoir pris cette décision, ça m'a soulagé d'un poids d'un seul coup.
Je ne nage plus seulement dans la baignoire, mais dans le bonheur aussi. Leokadia est devenue une belle petite fille, qui ne pense plus qu'à jouer et s'amuser, comme Karim et moi au même âge. Même Jess n'arrive pas à lui donner envie de faire ses devoirs.
Sa grande soeur, elle, commence déjà à avoir d'autres préoccupations en tête...
"T'es lourde Leokadia, j'suis déjà obligée de partager ma chambre avec toi, me colle pas tout le temps, j'veux pas jouer à la toupie avec toi, j'suis en sixième maintenant, c'est un truc pour les bébés et si Charles Roche que j'ai invité il me voit jouer avec toi, y voudra jamais me faire un smack !"
... elle est même un peu trop précoce à mon goût, mon aînée. Aux yeux de sa mère, je préfère ne même pas en parler.
Mais quand elles dorment et que règne le silence, on dirait vraiment deux petits anges qui s'entendent à merveille.
Ma nièce aussi a grandi. Elle s'est examinée sous tous les angles avant d'aller parfaire son inspection devant la glace, et elle et son image étaient visiblement ravies d'elles-même d'un commun accord narcissique.
Elle sait caresser dans le sens du poil, la petite. Dans un autre jeu de miroir, Karim est en admiration devant sa fille unique, la 7° merveille du monde, qui vient l'accueillir en hurlant de joie et d'admiration réciproque pour sa star de père.
Avec Jessica aussi, elle a compris comment la prendre par les sentiments.
Entre sa grande soeur qui veut jouer les grandes et sa petite soeur qui est trop petite, et, au milieu, sa cousine du même âge avec qui je préfère qu'elle ne passe pas trop de temps, je m'occupe vraiment bien de ma petite Leokadia. Je ne suis pas certain qu'elle partage toute ma joie, mais j'ai des choses à transmettre, et tant pis si ça sonne vieux d'affirmer ça.
" - Alors tu vois ma chérie, il y a hors jeu quand le premier attaquant est derrière le dernier défenseur, ou devant hein si tu regardes par l'autre côté du stade, enfin bref, entre le dernier défenseur et la cage quoi, et ça, attention, au moment où la passe est faite. Pas quand il la reçoit, non, non, non, les filles croient ça en général : c'est quand le ballon part qu'il faut avoir les yeux partout à la fois. Mais alors attention aussi, y a des subtilités ! S'il dépasse avec la tête, y a hors jeu, mais s'il dépasse avec le bras, y a pas hors jeu. Tu comprends ?
- Ouais, ouais, pas le bras... J'peux aller jouer ?
- Attends... Alors tu vois, quand les Llamas ont perdu 2-1 en finale, l'arbitre avait sifflé hors jeu mais il avait tort : c'était un hors jeu du bras, mais le hors jeu du bras, c'est pas un hors jeu ! Et ça, je l'ai écrit dans mon article quand j'ai couvert le match, et grâce à ça j'ai été vraiment reconnu comme chroniqueur sportif. Mais ce avec quoi j'ai gagné le prix Vandenpulz d'excellence du journalisme, c'est pour mon objectivité dans la description du non hors jeu de leur victoire 4-2 l'année d'après. Ecoute bien, parce que c'est la subtilité des subtilités, celle qui fait que, sans exagérer, le football est un art. Quand la balle part, et que le joueur est en position de hors jeu, avec le bras mais ça compte pas, et la tête, et tout ce que tu veux, bref, qu'il est en position de hors jeu, mais qu'il ne fait pas d'action de jeu, alors là y a hors jeu passif, et là y a pas hors jeu. Et alors dans ce match historique que ton vieux père a couvert avec brio, quand l'arbitre a pas sifflé, tout le monde a crié au scandale en face, mais l'arbitre, il avait raison ! Parce que le hors jeu, c'était un hors jeu passif, donc c'était pas un hors jeu, tu comprends ? Mais quand à la deuxième mi-temps, en face, ils ont voulu forcer le but quand ils sont remontés à 2 partout, l'attaquant, il a mimé le hors jeu passif. Mais quand tu fais comme si t'étais en hors jeu passif mais qu'en réalité tu veux faire une action de jeu dans ta tête, là, forcément, y a plus hors jeu passif, tu comprends, ça s'annule, puisque mentalement tu es actif. Et là, même si en apparence on était dans le même cas de figure, subtilité des subtilités des subtilités poétiques du foot, l'arbitre a sifflé, et il avait à nouveau raison, puisqu'un faux hors jeu passif, cette fois, ça fait un vrai hors jeu ! Et alors mon analyse, tu vois, elle était si limpide qu'elle a réussi à calmer les esprits qui voulaient refaire le match. C'était la première fois que le prix Vandenpulz a été décerné à un chroniqueur sportif depuis la création du prix ! Et vraiment, si la place avait pas été prise, j'aurais pu devenir légende du stade et insuffler un nouvel esprit de stratégie à l'équipe.
- OK... J'peux aller jouer maintenant ?"
Ah ! Je suis content, c'est la première fois qu'une fille me laisse finir l'explication jusqu'au bout, je me sens plus persuasif tout d'un coup !
"Et tu vois Atiya, quand il se passe chais pu quoi avec le ballon et là où sont les joueurs, ça peut être un truc passif et dans ce cas là ça compte avec le bras j'crois, mais tout ça mon père il le sait et il l'a écrit et tout le monde était d'accord avec lui et l'a acclamé, et c'est comme ça que mon père il a reçu sa belle coupe dorée de légende du stade d'honneur, et c'est encore mieux qu'être légende du stade tout court !"
Elle n'a rien retenu de la loi des lois du foot, mais qu'est-ce que je suis fier d'entendre ça. Je suis légende du stade d'honneur pour ma petite fille !
Le journal de Leokadia
Cher journal,
Aujourd'hui, Maman m'a accordé une augmentation de mon argent de poche, je vais recevoir 4 simoléons par semaine. La seule chose que j'avais à faire, c'était énerver Atiya pour faire plaisir à Papa. Super fastoche !
Maintenant, Maman essaye de faire la même chose avec Salomeja. Des fois, je comprends rien à leurs histoires aux grands.
" - Nounours copain ! Nounours copain !
- Bravo Salomeja ! Maintenant répète après Maman : "Papa est le roi du ballon rond"
- Poupa é woi bawon lon
- Bravo !!! Maintenant tu vas être toute mignonne et tu vas aller le dire à ton papa, sans lui dire que c'est Maman qui t'a demandé, d'accord ?
- D'acco ! Poupa woi du bawon !
- Au moins avec toi, ça reste gratuit pour l'instant..."
| << Episode 22 : Elles ont du caractère, et dans leurs artères, c'est du sang chaud qui coule ! | Episode 24 : Le drame de ma vie >> |
/https%3A%2F%2Fstorage.canalblog.com%2F91%2F10%2F348757%2F42113308.jpg)
/https%3A%2F%2Fstorage.canalblog.com%2F99%2F71%2F348757%2F29893314_o.jpg)
/https%3A%2F%2Fstorage.canalblog.com%2F84%2F84%2F348757%2F29883099_o.jpg)
/https%3A%2F%2Fstorage.canalblog.com%2F50%2F93%2F348757%2F29851732_o.jpg)